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U tonu rossu

Thon rouge



Contexte

A Cullettività Territuriale di Corsica, à travers l’ADEC puis l’Uffiziu di l’Ambiente di a Corsica (depuis 2007) accompagne, techniquement et financièrement, les filières de la pêche professionnelle. Cela a permis d’acquérir une vision précise de cette profession ainsi que ses difficultés sachant  la Petite Pêche Côtière a un rôle primordial tant sur le plan international que régional.
 
Cette pêche est artisanale, ancestrale, spécifique à notre territoire insulaire et respectueuse des ressources marines. A ce titre, une motion a été adoptée à l’unanimité par l’Assemblée de Corse, fin septembre, pour faire reconnaitre la spécificité de la pêche corse au sein de la Stratégie Nationale Mer et Littoral et du futur Document Stratégique de Façade pour la méditerranée (DSF). La ministre Ségolène Royal a bien pris en considération ce document en l’intégrant à la SNML.
 
Les revenus de la pêche professionnelle corse reposent principalement sur une espèce, la langouste rouge exploitée par 95 % de la flottille. Cette ressource va en se raréfiant et la réflexion qui prévaut, depuis 10 ans, est de savoir comment assurer des revenus décents aux pêcheurs alors que les stocks de langoustes ne sont pas en mesure de supporter cet effort de pêche.
 
La mise en place d’une diversification peut y contribuer, notamment par un changement d’espèces cibles. Ainsi, se pose la question de l’orientation vers la pêche au thon rouge.
 

Le stock de thon rouge

Aujourd’hui, il convient de rester prudent, mais il semblerait que les populations de thons rouges en Méditerranée soient en phase d’évolution favorable. En effet, les scientifiques, les pêcheurs professionnels et récréatifs ainsi que les plaisanciers s’accordent à dire que le stock de cette espèce, pélagique et migratrice, soit en voie de rémission.
 
Il convient également de prendre en considération la structure des populations, puisqu’il semblerait qu’on observe davantage de jeunes individus (dizaines de kilos) que de très gros animaux (centaines de kilos).
 
Une évaluation complète des stocks aura lieu en juillet 2017. Si le Rendement Maximal Durable (RMD) est atteint. L’ICCAT élèvera probablement les quotas de manière significative pour les années à venir.

AEP et quotas

Les antériorités :
 
L’attribution des Autorisations Européennes de Pêche (AEP) et des quotas s’effectuent, principalement au regard des déclarations effectuées par les professionnels. Aussi, une priorité est accordée aux nouveaux entrants.
 
Ce modèle juridique nationale de dévolution des droits à pêcher, basé sur les antériorités, apparait inopportun, comme en témoigne ces deux réflexions :
  • Un pêcheur exploitant les espèces benthiques ainsi que la langouste rouge sera dans l’incapacité de se reconvertir, faute de déclarations. Alors que cette reconversion s’inscrirait dans une gestion plus durable pour des ressources.
  • Le risque de fausses déclarations est accru, si le pêcheur souhaite obtenir des droits supplémentaires, les années suivantes.
 
Dans ce contexte et au regard de la situation encourageante de l’évolution encourageante de l’état des stocks, il semblerait constructif de revoir les critères d’attribution ainsi que de rehausser les taux accordés aux pêcheries artisanales, (actuellement de 15% au niveau national et de 0.15 % au niveau de la Corse).
 
Cela met en exergue le fait que ce sont les secteurs les plus productifs, les thoniers senneurs sétois, qui bénéficient de 85% des droits de pêche.
 
Le constat est unanime à l’échelle méditerranéenne, la volonté est clairement affichée de sortir de cet arbitrage politique, basé sur des déclarations préalables. Cela vaudra aussi pour les répartitions de quotas au titre de l’espadon.
 
La situation en Corse
 
La pêche au thon rouge est une activité ancestrale au niveau de la Corse. Les engins utilisés sont la palangre et la canne, il s’agit bien d’une petite pêche artisanale et sélective.
 
Cette année, les droits à pêcher (non transférables) s’élèvent à cinq tonnes, à travers sept AEP, répartis entre trois palangriers et quatre canneurs, ces deux segments ayant chacun leur propre quota.
 
Il est précisé que trois bateaux, affiliés à des Organisations de Producteurs sur le continent, évoluent en Corse, avec leur propre quota.
 
Cette situation n’est pas viable pour les professionnels insulaires. Effectivement, le tonnage limite est atteint en un temps très court et pour assurer la rentabilité économique de leurs entreprises, les pêcheurs exploitent les ressources benthiques ainsi que la langouste rouge, dont l’état des stocks est préoccupant.
 
Par ailleurs, le nombre d’AEP est insuffisant, puisqu’environ 40 demandes sont répertoriées chaque année. De nombreux pêcheurs seraient prêts à cesser la pêche à la langouste pour s’orienter vers ces types de pêche aux pélagiques.
 
Afin de permettre cette diversification, il sera nécessaire de déverrouiller le système d’attribution actuel, basé sur les antériorités. Pour se faire, il conviendrait de solliciter l’ICCAT dans le but de mettre en place, à l’échelle européenne, un pourcentage satisfaisant dédié aux petits métiers côtiers. Cette évolution permettrait de :
  • s’inscrire au sein d’un système plus équitable, plus vertueux, pour les professionnels, d’une part et ;
  • limiter des pêches impactantes sur les ressources halieutiques fragiles, d’autre part.
 
Aussi, dans la mesure où l’ICCAT tend à augmenter les quotas de thons rouges, il ne s’agit pas de réduire les droits à pêcher dédiés aux sétois mais de faire bénéficier les PMC de cette augmentation.
 
Enfin, au niveau de la Corse, les attributions se sont basées sur des déclarations très faibles et éloignées de la réalité, on peut ainsi considérer qu’elles ont été faites de manière plus ou moins arbitraire. Une renégociation de l’arbitrage semblerait donc envisageable.
 

Problèmes des prises accessoires et accidentelles

D’autres problématiques qu’il est nécessaire d’aborder et de tenter de solutionner sont les prises accessoires et accidentelles (une définition plus précise sera à établir dans le cadre de l’ICCAT et du règlement DCF qui prévoit également les cétacées, tortues et oiseaux marins).
 
Les prises accessoires concernent les prises de thons réalisées dans le cadre de la pêche à l’espadon qui présente les mêmes caractéristiques en termes de zones de pêche, embarcations,  hameçons et appâts. Les pêcheurs sont unanimes pour affirmer que les prises de thons sont devenues plus fréquentes que celles d’espadons et qu’il est actuellement impossible de pêcher de l’espadon en évitant le thon.
 
Les prises accidentelles concernent, quant à elles, les captures de thons dans les filets à poissons ou à langoustes.
 
Actuellement,  un pêcheur sans AEP qui prend un thon a, d’un point de vue réglementaire, obligation de le rejeter. Ce cadre présente une incohérence flagrante, qui place le pêcheur dans une insécurité juridique et une destruction de la ressource qui n’a pas de sens. Ceci est d’autant plus choquant dans le cadre de l’objectif « zéro rejet » prôné par la commission européenne. Un discours argumenté, auprès de la DPMA, est nécessaire pour obtenir un cadre réglementaire satisfaisant.
 
 
 
Les prises accessoires :
 
Le droit national ne permet pas de couvrir les captures accessoires des Petits Métiers Côtiers tels que pratiqués en Corse. En revanche, il protège par un quota de 5% les captures accessoires de chalutiers.
 
Comme pour d’autres états membres tels que l’Italie, il serait indispensable d’obtenir un quota également pour les pêches artisanales afin de couvrir juridiquement ces captures accessoires.
 
Les captures accidentelles
 
A ce jour, on déplore un vide juridique quant aux captures accidentelles. Le quota de 5% ne serait pas utile puisque le poids d’un thon sera disproportionné par rapport aux autres espèces pêchées.
 
Une réflexion est engagée afin d’établir un système de bagues répondant aux besoins de la profession. Ces besoins seront étayés par des études scientifiques.
 
Il est supposé que, si un tel système se met en place, il serait géré au sein des prud’homies.
 

L’importance des suivis scientifiques

Comme en témoigne les travaux sur la pêche artisanale dans les Bouches de Bonifacio, débutés il y a une trentaine d’années, qui ont servis dans toutes les instances internationales à démontrer le caractère durable des pêches artisanales et côtières en Méditerranée,  il est incontournable de se doter de données scientifiques, afin de compléter notre argumentaire.
 
Depuis décembre, l’OEC est partenaire de la DCF (Système d’Informations halieutiques) dont les données issues de l’échantillonnage montreront cette caractérisation de la pêche corse ainsi que les captures accessoires. Ce partenariat permettra également la participation de la Corse au sein des réunions à l’échelle nationale et méditerranéenne. La Corse sera partie prenante des discussions et comblera le manque d’information souligné par la DPMA.
 
Aussi, la mise en œuvre des mesures 28 et 77 du FEAMP permettront d’alimenter notre argumentaire quant aux besoins d’AEP de quotas ainsi que la problématique des prises accessoires et accidentelles.
 
Il est rappelé aux pêcheurs le caractère anonyme de ces démarches.
 
Les rapports de scientifiques, issus de ces travaux, seront fondamentaux pour faire évoluer la situation existante.

Problématiques communes à l’ensemble des PMC de Méditerranée

Les questions d’AEP, de quotas, de prises accidentelles et accessoires sont évoquées par l’ensemble des petits métiers côtiers de Méditerranée. La Corse n’est pas isolée dans ces problématiques.
 
Nos démarches doivent s’associer aux mouvements de pressions actuellement exercées par les associations, CRPMEM, CNPMEM, ONG et s’inscrire judicieusement dans le calendrier des discussions des instances décisionnelles (ICCAT en novembre, niveau national entre l’administration des pêches et le CNPMEM en lien avec les CRPMEM décembre/janvier et sortie des arrêtés nationaux février).
 
La participation au conseil consultatif du MEDAC serait également favorable puisqu’il a un écho de plus en plus important auprès de la commission européenne.